Parfois l'art devient une performance physique. Et vice-versa. Hier soir, Vincent de Lavenère en a donné une représentation pratique avec "Paï Saï", un spectacle de jonglerie hors normes, présenté dans le cadre du Projet intercommunal de cirque.
Il est seul en scène pendant près d'une heure. Durant tout le spectacle, il ne prononce pas un mot. Mais le public est sous le charme de cet athlète aux gestes souples et déliés, de ce jongleur qui nous fait naviguer d'un univers à l'autre, en l'occurrence du Béarn au Nord Laos. Le passage du monde des bergers aux limites de l'Empire du Milieu se fait naturellement, de la transhumance à un rituel de combat; Vincent de Lavenère fait de la scène de l'Escapade un lieu de voyage immobile (pour les spectateurs). Les sons des deux continents s'enchevêtrent, se succèdent et se répondent de façon harmonieuse. Tout compte fait, sommes-nous si différents que cela malgré des milliers de kilomètres d'écart? Avec "Paï Saï", Vincent de Lavenère et la compagnie Chant de Balles se garde bien de donner une réponse.
Mais le one-man-show muet du jongleur prouve que, parfois, les mots ne sont pas utiles pour connaitre et comprendre l'autre. Quelques objets usuels , un corps (sombre) qui se meut dans l'espace (blanc) et la magie opère. Dans son numéro final, Vincent de Lavenère transforme ses balles de jongleur en un véritable feu d'artifice. Dans un crescendo continu, le nombre de balles augmente à chaque salve et l'artiste achève son tour avec huit balles dont plusieurs finissent leur trajectoire sur le sol et non dans les mains du lanceur. Véritable maladresse ou manoeuvre délibérée? Alors que le spectacle semble fini, Vincent de Lavenère prend la parole, à la surprise du public : "La jonglerie, c'est comme une balade en montagne. Soit on s'arrête avant, soit on y va. Alors, on s'arrête ou on y va?" Les huit balles repartent dans les airs et après plusieurs élégantes arabesques atterrissent toutes dans les mains du jongleur. Laotien, Béarnais ou Chti, peu importe, son défi à la pesanteur emporte l'adhésion des spectateurs. La performance a aboli les barrières et les frontières mais aussi fait découvrir des cultures différentes. C'est beau le cirque.
29 novembre 2006
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