13 novembre 2006

Ami, entends-tu?

"Bin, in n'est pas rindu, mi j'vous le dis". Manu, une silhouette blafarde et désincarnée lance cette forte sentence en aidant Janine à regagner son café. Le ton est donné, "les Gueules noires" ont fait basculer, dimanche, les spectateurs de l'Escapade dans un univers si proche et si lointain.
Patron, tenancière d'estaminet, syndicaliste, curé, tout ce petit monde a fait partie du quotidien des mineurs au fil des générations successives. La compagnie la Briganderie leur a rendu vie sur la scène de l'Escapade. En fait, parler de la scène est un peu réducteur. Car les spectateurs ont été mis à contribution. Normal, c'est un bistrot qui est le point central de la pièce. Il suffit juste de repousser les murs et d'agrandir le café. Ce que les comédiens ne se sont pas gênés de faire. Et le curé de distribuer hosties et récompenses dans les rangs de spectateurs surpris et hilares, ou Janine de faire servir bière et autre boisson aussitôt ingurgitées par Albert, le pilier de comptoir.
Entre une parodie de messe, la lecture d'un texte (surréaliste et hallucinant) sur les ouvriers vue par la bourgeoisie en 1910, ou un combat de coqs "cartoonesque"; Janine, Manu, Jojo (l'amoureux de Janine), Shaquespire (une gueule cassée à la folie pleine de pertinence) et tous les autres personnages ont fait reprendre des airs indémodables (lampiste, eun goutt d'jus...) par une assistance ravie.
La nostalgie habituellement invoquée dans ce genre de spectacle n'a pas cours chez "les Gueules noires". On préfère mesurer l'évolution des choses en constatant et contestant vigoureusement la recherche effrénée du profit et finir sur la très belle chanson de Léo Ferré "l'âge d'or" (... Et, le plus souvent, Lundi sera dimanche. Mais notre âge alors Sera l'âge d'or). Après, il est toujours temps de se restaurer et de refaire le monde en partageant une soupe à l'oignon. C'est beau, un dimanche à l'Escapade.

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